Le mardi 11 novembre 2025, Kaboré a comparu devant la chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Ouaga I pour répondre des faits d’escroquerie au préjudice de Sawadogo, portant sur un montant total de 3 150 000 FCFA.
Courant août 2025, Kaboré s’est rendu au service de Sawadogo, se présentant comme une personne capable de l’aider à faire prospérer ses affaires. Selon la victime, le prévenu aurait soigneusement préparé son stratagème avec la complicité présumée de dame Nana, secrétaire de Sawadogo, afin d’obtenir des informations sur sa vie privée et professionnelle.
Fort de ces informations, Kaboré aurait manipulé Sawadogo en lui réclamant de l’argent pour effectuer des sacrifices censés résoudre ses difficultés professionnelles. Au fil des mois, la victime a commencé à soupçonner des manœuvres visant à lui soutirer de l’argent. Il a alors porté plainte pour escroquerie.
À la barre : la version de Kaboré
Le tribunal interpelle le prévenu :
— « Expliquez-nous ce qui s’est passé », demande le juge.
— « Je suis allé chez Sawadogo pour régler une facture. Il m’a vu et m’a demandé de faire des sacrifices pour que ses affaires marchent. Je me suis rendu à Bobo-Dioulasso, Ouahigouya et à Ouagadougou. J’ai pris d’abord 950 000 FCFA, puis 500 000 FCFA et d’autres montants pour payer des bœufs et des moutons destinés aux sacrifices », répond Kaboré.
— « Quelle est votre activité ? »
— « Je suis commerçant ».
— « Êtes-vous sacrificateur ou marabout ? »
— « Non, je suis commerçant, je vends des sacs ».
— « Connaissiez-vous Sawadogo auparavant ? »
— « Non ».
— « Que vous reproche-t-il ? »
— « Vraiment, je ne sais pas ».
— « Avez-vous pris des photos des sacrifices pour les lui montrer ? »
— « Non ».
La version de la victime
Le tribunal appelle ensuite Sawadogo :
— « Que s’est-il passé ? »
— « Le tribunal à Sawadogo : « Qu’est-ce qui s’est passé ? »
« Lorsqu’il est venu au bureau, il m’a vu et a demandé à consulter mes paumes. Ensuite, il a cité exactement le nombre de mes enfants ainsi que des informations sur ma vie au village, sans se tromper. Il m’a alors dit qu’il était marabout et que j’avais un problème nécessitant des sacrifices. Il a pris 800 000 FCFA pour se rendre à Ouahigouya afin d’y faire des sacrifices, puis d’autres montants par la suite. J’ai compris plus tard que c’était ma secrétaire, dame Nana, qui le renseignait sur ma vie privée et professionnelle. Il m’a remis une boîte à utiliser pour boire.
Un jour, ayant pris le téléphone de dame Nana pour appeler Kaboré, j’ai constaté qu’ils étaient en contact régulier, avec des appels à 6 heures du matin, avant la prise de service, et vers 13 heures, à la pause. C’est à partir de ce moment que j’ai décidé de porter plainte pour escroquerie. Il m’a pris plus de 3 000 000 FCFA pour de prétendus sacrifices. C’était pour m’escroquer », déclare-t-il.», explique-t-il.
— « La secrétaire travaille-t-elle toujours avec vous ? », demande le tribunal.
— « Oui », répond Sawadogo à ce stade de l’audience.
Confrontation
Interpellé à nouveau, Kaboré nie les accusations :
— « Ce n’est pas vrai tout ce qu’il dit », affirme-t-il, niant également avoir consulté les paumes de la victime.
Le procureur l’interroge :
— « Dame Nana savait-elle que le patron vous donnait de l’argent ? »
— « Non ».
— « Lui donniez-vous de l’argent ? »
— « Non ».
Face à l’absence de dame Nana à cette audience, le tribunal décide de suspendre l’affaire et de la renvoyer pour permettre son témoignage.
Audience du 2 décembre 2025 : témoignage de dame Nana
À la reprise, dame Nana indique qu’elle ne travaille plus avec Sawadogo depuis le 28 octobre 2025.
— « « Dites-nous ce que vous saviez de cette affaire », demande le tribunal à dame Nana.
« Je suis la secrétaire du patron et j’avais une relation avec lui. Je ne connaissais pas Kaboré. Un jour, il m’a vue en circulation et m’a dit que j’étais sortie avec un monsieur à bord d’un véhicule de couleur X, dans un endroit précis. C’était effectivement avec le patron, et je lui ai confirmé. Il m’a ensuite demandé de payer de l’eau. Il a pris l’eau, m’a remis une boîte et m’a dit de boire. Il a pris mon contact et, un autre jour, nous nous sommes rencontrés près de chez moi. Il m’a dit que je n’étais pas la seule à sortir avec le patron et qu’il y avait une autre femme qui travaillait avec lui . Il m’a assuré qu’il allait m’aider à être la seule convoitée par le patron. Ce n’est qu’à la police que j’ai appris qu’on m’accusait de vendre des informations de l’entreprise », explique-t-elle.»
— « Est-ce que vous saviez que Kaboré recevait de l’argent du patron ? », demande le tribunal.
— « Non », répond dame Nana.
— Le tribunal à Sawadogo : « Quelle confiance aviez-vous établie avec Kaboré ? »
— Sawadogo : « Il y a eu un accident, il m’a appelé et ce qu’il m’a dit était vrai. »
— Le tribunal à Kaboré : « Et l’histoire de la boîte ? »
— Kaboré : « Je l’ai seulement remise à dame Nana. »
— Dame Nana : « Effectivement, il m’a dit d’utiliser la boîte pour boire l’eau. »
— Le tribunal à Kaboré : « Combien avez-vous reçu de la part de Sawadogo ? »
— Kaboré : « Il m’a donné de l’argent pour effectuer des sacrifices pour lui. »
— Le tribunal : « Pourquoi c’est à vous qu’il a confié ses sacrifices ? »
— Kaboré : « C’est la confiance. »
— Le tribunal : « Vous a-t-il déjà demandé d’autres sacrifices ? »
— Kaboré : « Non. »
— Le tribunal : « Faites-vous des sacrifices pour d’autres personnes ? »
— Kaboré : « Non, je suis commerçant. »
— Le tribunal : « Vous maintenez que vous n’êtes pas marabout ? »
— Kaboré : « Oui, je suis commerçant. »
— Le tribunal à dame Nana : « Il affirme qu’il n’est pas marabout. Qu’en dites-vous ? »
— Dame Nana : « Je ne savais pas qu’il était un escroc. »
— Le juge insiste : « Non, on a dit qu’il faisait des sacrifices, on n’a pas dit qu’il était escroc. »
Observations du tribunal
Le tribunal fait observer à la victime que plusieurs informations évoquées par Kaboré n’étaient pas secrètes et pouvaient être vérifiées facilement, ce qui a facilité la manipulation.
Au titre des réclamations, Sawadogo sollicite le remboursement de la somme de 3 150 000 FCFA ainsi que la remise de la moto de dame Nana.
Réagissant à cette demande, dame Nana s’y oppose fermement :
« Non, pas question. Quand nous sortions ensemble, c’est toi qui m’as demandé de prendre un crédit pour payer la moto. Tu m’avais dit que tu allais plaider auprès de ton frère, le grand patron, pour l’octroi, et que tu allais gérer le reste », déclare-t-elle.
À ces propos, Sawadogo lève les deux bras et présente ses excuses.
Réquisitions et verdict
Dans ses réquisitions, le procureur estime que l’infraction d’escroquerie est caractérisée :
« Kaboré a usé de manœuvres frauduleuses en exploitant la crédulité de Sawadogo. Il a instauré la confiance et perçu des sommes d’argent sous prétexte de sacrifices. »
Il requiert 24 mois de prison, dont 12 mois ferme, et une amende de 500 000 FCFA avec sursis.
Dans son verdict rendu le mardi 23 décembre 2025, le tribunal reconnaît Kaboré coupable d’escroquerie et le condamne à 12 mois de prison ferme et à une amende de 500 000 FCFA avec sursis. La constitution de partie civile est jugée fondée, et Kaboré est condamné à payer à Sawadogo la somme de 3 150 000 FCFA à titre de réparation.
Par Reine Zongo|Zoodomail.com
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