
Ceci est une explication détaillée de la fête de l'Assomption par le Pére Marius Djadji.
Le 1er novembre 1950, dans une basilique saint Pierre, devant plus de huit cents évêques, le Pape Pie 12, utilisa pour la première fois depuis le Concile Vatican I l’infaillibilité et parla ex cathedra, à travers La Constitution Munificentissimus Deus en proclamant le dogme de l’Assomption.
Il faut préciser que dans l’Eglise catholique cette autorité du Pape, découle de l’infaillibilité du Christ tête de l’Eglise, qui rejaillit sur l’Eglise corps du Christ, et qui réagit sur son Pasteur universel, Pasteur premier, Successeur de Pierre. L’infaillibilité c’est une grâce, qui se comprend à partir de la définition de l’Eglise, comme Ecclésia, qahal Yahvé, l’Assemblée de ceux qui ont répondu à l’appel de Dieu.
L’Eglise découle de la Trinité. Si le Christ qui est la tête de l’Eglise est Dieu, donc infaillible, son Eglise guidée par l’Esprit Saint, lorsqu’elle doit parler de tout ce qui concerne la foi, la doctrine de l’Eglise, la morale, bénéficie de l’infaillibilité de la Trinité, le Pape à son tour bénéficie de cette infaillibilité. Il n’utilise pas ce droit, cette autorité chaque matin. De 1870 à nos jours, c’est en 1950 seulement que le Pape a usé de son infaillibilité pour proclamer une définition dogmatique. Donc Jean XXIII, Paul VI, Jean-Paul 1er, Jean-Paul II et Benoît XVI n’ont pas usé l’infaillibilité. Et François ne l’a pas encore utilisé.
Pour proclamer une définition dogmatique, le Pape consulte l’Eglise toute entière qui est infaillible, il s’appuie sur la Bible, la Tradition, le vécu des chrétiens, et la prière de l’Eglise qui l’accompagne. C’est ce que le Pape Pie XII a fait dans la proclamation du dogme de l’Assomption. Dans le texte de la Déclaration, le Pape met en lumière, les fondements bibliques, l’enseignement des premiers chrétiens, des théologiens, la pratique des chrétiens et le souffle de l’Esprit. C’est à partir de là qu’il fait cette déclaration dogmatique qui engage tous les catholiques :
Voici la Déclaration dogmatique
« Par l’autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux apôtres Pierre et Paul, et par la Nôtre, Nous proclamons, déclarons et définissons que c’est un dogme divinement révélé que Marie, l’Immaculée Mère de Dieu toujours Vierge, à la fin du cours de sa vie terrestre, a été élevée en âme et en corps à la gloire céleste ».
Explication du Dogme :
Au regard du texte de quatre lignes, on peut ne pas être frappé par l’enseignement. Mais il faut retenir qu’ici, tous les mots, expressions et leur emplacement ont un sens théologique.
Le texte commence par cette expression :
« Par l’autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ » :
Ici le Pape veut nous dire que l’enseignement qu’il proclamer ne vient pas de lui. Son autorité découle de celle du Christ. Comme je l’ai si bien dit, l’infaillibilité du pape découle de la tête de l’Eglise, le Christ. En citant le Christ, c’est la Trinité Sainte qui est mise en évidence au nom de l’Unité des trois Personnes divines dans l’agir. Le Pape veut nous dire simplement que l’Eglise appartient à Dieu.
« Des bienheureux apôtres Pierre et Paul » :
Ici le Pape met en évidence l’apostolicité de l’Eglise. Quand dans le Credo nous professons : « Je crois en l’Eglise apostolique », nous disons que l’Eglise est fondée par les apôtres. Il cite Pierre son successeur, le chef des apôtres. La figure de Pierre nous renvoie à la remise de la clé ecclésiale : «Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et la Puissance de la mort n'aura pas de force contre elle. Je te donnerai les clés du Royaume des cieux ; tout ce que tu lieras sur la terre sera lié aux cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié aux cieux. (Mat 16,16-18)»
Il cite ensuite Paul, le grand missionnaire. Il met en évidence deux Charismes complémentaires, deux figures importantes, chacune avec son charisme. Ici c’est la complémentarité des charismes.
« Et par la Nôtre » :
Ici le Pape utilise un Nous ecclésial, ce Nous qui met en exergue son autorité qui découle de celle du Christ et de ses apôtres mais aussi ce Nous, c’est toute l’Eglise, tous les chrétiens, l’Eglise triomphante, l’Eglise souffrante et l’Eglise en marche.
« Déclarons et définissons » :
Ici, le Pape n’utilise pas le singulier. Il ne dit pas « Je ». Le pluriel montre que c’est la Trinité, les apôtres et tous les chrétiens qui parlent à travers lui. C’est cela l’inspiration. Nous découvrons l’humilité, la kenose. Le moi est effacé pour un Nous. Il ne dit pas : « Je prends autorité » ; « J’ordonne » ; « Je parle ». Le Nous dans l’Eglise et dans la prière est communionnelle et spirituellement important. Dans l’Eglise ce n’est pas toi qui fais, ce n’est pas le moi qui agit, c’est le Nous.
Dans l’Eglise catholique c’est le Nous ecclésial et communionnel qui est le pilier de la vie de chaque fidèle et du fonctionnement des paroisses. On ne fait rien par mérite, ce n’est pas parce que tu es fort que tu chasses un démon, ce n’est pas ton moi qui fait l’Eglise, ce n’est pas ton charisme qui fait la paroisse ou le groupe de prière, c’est la prière de chaque Catholique qui te soutient dans toutes tes prières et ta pastorale. C’est ce Nous qui est exprimé à la messe quand le prêtre de Yaobou cite l’évêque du diocèse et le Pape. Par l’évêque c’est la communion avec tous les chrétiens du diocèse et par le Pape, c’est la communion avec tous les chrétiens catholiques du monde.
Donc dans l’Eglise catholique personne ne fait sa petite église à part, dans son petit coin. Ce n’est pas parce que tu réunis des millions de personnes que tu fais Eglise, c’est parce que tu es en communion avec les évêques et le Pape que tu fais Eglise. Voilà pourquoi tu ne fais pas ce que tu veux à la messe, sur la paroisse ou dans ta communauté. Un chrétien catholique n’est jamais seul.
« un dogme divinement révélé » :
Le dogme c’est la doctrine, c’est l’enseignement de l’Eglise. Ici le Pape Pie XII affirme de manière explicite que l’enseignement qu’il donne, vient de Dieu. C’est-à-dire que depuis les Ecritures, dans la pratique de l’Eglise depuis les premiers siècles, Dieu a révélé de manière directe et indirecte ce qu’il va annoncer. Quand on lit l’ensemble de la déclaration, le Pape exprime qu’implicitement déjà Dieu parlait et orientait l’Eglise jusqu’à ce que maintenant de manière explicite la doctrine soit proclamée.
« Marie, l’Immaculée Mère de Dieu toujours Vierge » :
Avant de proclamer l’enseignement dogmatique, le Pape cite Marie et il ajoute trois appellations ou titres dogmatiques, c’est-à-dire les trois dogmes mariaux, qui sont utilisés ici comme des titres. Avant 1950, il y avait trois dogmes mariaux : Marie Mater Dei (Mère de Dieu), Marie toujours Vierge (La Virginité Perpétuelle) et l’Immaculée conception, le dernier dogme définit par l’Eglise en 1854. Le Pape ne rappelle pas simplement les trois dogmes mais théologiquement, il veut nous dire que le dogme de l’Assomption qu’il s’apprête à définir n’est pas isolé bibliquement, théologiquement. Il veut dire que ce qu’il va proclamer se comprend à partir des trois premiers dogmes. C’est parce qu’elle est Mère de Dieu qu’elle est Vierge, c’est parce qu’elle est Mère de Dieu et Vierge qu’elle est Immaculée conception. Le fil de compréhension de tous les dogmes, est : Mater Dei. Tout découle de là. Ce n’est pas par hasard que le dogme central est entre l’Immaculée et la Virginité Perpétuelle.
« à la fin du cours de sa vie terrestre » :
Cette expression donne lieu à des interprétations théologiques. Il y a des théologiens, pasteurs et fidèles qui développent une théologie de la mort de Marie en disant qu’ici, l’expression voudrait dire qu’à la fin de sa vie, au terme de son existence, donc à la mort de Marie, parce que ce qui met fin à la vie de tout être vivant c’est la mort. Donc Marie est morte et l’Assomption a eu lieu donc après la mort. Les tenants de cette thèse tombent dans la doctrine orthodoxe de la dormition (Mort paisible) qui est le contraire de l’Assomption. Dans le dogme de l’Assomption cette expression ne signifie pas la mort. Si le Pape n’a pas parlé de la mort de manière explicite, il veut nous montrer que chez Marie ce n’est pas la mort qui met fin à sa vie, mais l’enlèvement, la montée, l’Assomption. C’est ce qu’il déclare à la finale :
« a été élevée en âme et en corps à la gloire céleste » :
L’élévation ici, n’est pas une ascension mais une assomption. Parce que seul Jésus a connu l’ascension. Car l’ascension est une épiphanie, une théophanie, une manifestation du pouvoir du Christ qui de lui-même, à partir de son pouvoir monte. Alors que dans l’Assomption c’est le Christ qui fait monter sa Mère, il associe sa Mère à ce qu’il est et à ce qu’il fait. Marie ne monte pas d’elle-même, mais c’est son Fils qui a vaincu la mort, qui a vaincu la putréfaction tombale, qui préserve de la mort, celle qui l’a porté et à travers elle, enseigne la destinée finale de tous ceux qui reste fidèle à leur fiat baptismal.
Enfin il y a une précision importante. La montée prend en compte le corps et l’âme, c’est ce qu’on appelle l’Assomption corporelle c’est-à-dire la montée de toute la personne de Marie ce qui est contraire à l’Assomption incorporelle, c’est-à-dire une montée seulement de l’âme sans le corps.
A tous les catholiques, le Pape Pie XII conclut sa Déclaration en affirmant: « Qu’il ne soit permis à qui que ce soit de détruire ou d’attaquer ou contredire, par une audacieuse témérité, cet écrit de Notre déclaration, décision et définition. Si quelqu’un avait la présomption d’y attenter, qu’il sache qu’il encourrait l’indignation du Dieu Tout-Puissant et des bienheureux apôtres Pierre et Paul >>.
Père Marius Hervé Djadji
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