
Ce 7 juillet 2025, la Société Cotonnière du Gourma (SOCOMA), acteur historique du coton burkinabè, a annoncé dans une note officielle le licenciement de la totalité de son personnel permanent et saisonnier. Une décision douloureuse, mais prévisible, qui sonne comme un coup de tonnerre dans la région de l’Est du Burkina Faso. Ce licenciement collectif, justifié par un “manque d’activités depuis trois campagnes”, témoigne d’une crise structurelle qui ronge silencieusement la filière cotonnière nationale.
Créée le 14 juillet 2004 suite à la libéralisation du secteur, la SOCOMA est née sur les cendres de la SOFITEX dans la zone Est. Filiale du groupe GEOCOTON (75 % du capital), avec l’appui de l’Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina (UNPCB, 13 %) et d’investisseurs burkinabè (12 %), elle s’était imposée comme une force motrice du développement rural, en apportant appui technique, intrants agricoles, et services d’égrenage aux producteurs de coton graine.
Sous la direction de M. Lucien Gaudard puis de M. Ali Compaoré, la SOCOMA avait inscrit son action dans une démarche de développement durable, misant sur la diversification des cultures vivrières, la sécurité alimentaire, et la préservation de l’environnement. Certifiée « Cotton Made in Africa » par l’ONG Aid by Trade, elle faisait figure de vitrine du coton équitable produit au Burkina Faso. Dans les villages de Fada, Kantchari, Diabo ou Bogandé, les hangars de la SOCOMA n’étaient pas que des centres de collecte : ils représentaient l’espoir, l’emploi, et le lien avec le marché international.
Mais aujourd’hui, ce modèle vacille. Trois campagnes blanches, des investissements plombés, des débouchés fragiles… et une pluie de licenciements. Si la Direction générale dit regretter cette décision, saluant l’engagement de ses travailleurs « depuis des décennies », elle reconnaît que la SOCOMA traverse la plus grave tempête de son histoire.
Alors que l’agriculture burkinabè reste la principale source de revenu pour des millions de familles, ce recul du coton dans l’Est n’est pas un simple fait divers économique : c’est un drame humain, social et territorial. Derrière chaque contrat rompu, ce sont des familles, des jeunes, des femmes rurales qui voient s’éteindre un avenir.
Il est temps de poser les vraies questions : comment reconstruire une filière coton plus résiliente ? Quel rôle pour l’État et les partenaires techniques et financiers dans la relance ? Faut-il réinventer le modèle coopératif ou miser davantage sur la transformation locale du coton burkinabè ? Quelles passerelles entre coton et agroécologie dans un contexte de changement climatique et d’insécurité ?
La SOCOMA a été un acteur clé de la sécurité alimentaire et du développement rural à l’Est. Son effondrement, s’il se confirme, ne doit pas être une fin. Mais un appel à repenser l’avenir du coton burkinabè, à diversifier les sources de revenus agricoles, et à placer enfin les producteurs au cœur des décisions. Car sans les bras des paysans, sans leur savoir-faire et leur dignité, aucun label, aussi équitable soit-il, ne peut survivre.
Zoodomail.com reste mobilisé pour relayer la voix des oubliés de la mondialisation agricole, des femmes et des hommes qui ont porté le coton du Gourma sur leurs épaules. La crise de la SOCOMA est peut-être un tournant. Elle doit surtout devenir un signal fort pour reconstruire, autrement.
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Par Yamyélé|Zoodomail.com
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