Les symboles de la royauté moaaga de Busma : l’Etalon du pouvoir, le cheval de la puissance !

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Cheval

Le cheval est au cœur de la royauté moaaga. Que serait le roi sans le cheval, sans l’étalon ? Comment exprimer la majesté sans cet animal atypique qui symbolise la puissance et la noblesse. Pour les nanambsé du Riungu de Busma, le cheval est avant tout le symbole de la royauté. 

 

La domestication du cheval, au début du IIè millénaire en Asie centrale et orientale, a produit des merveilles dans la diffusion des nouvelles grâce à l’accroissement de la vitesse qui est passée de 10-12 kilomètres à l’heure du coureur à pied à 20-25 kilomètres à l’heure pour le cheval. En mooré, le cheval est désigné par le mot « wééfo » (plur. : wiidi). Avec l’apparition du vélo, les Moosé lui attribuent le nom « wééfo » en prenant soin de spécifier en distinguant le cheval par « wéd-moaaga » (le cheval ou vélo des Moosé) et « kut-wééfo » (cheval de fer) pour le vélo. Cette dénomination ethnocentriste du cheval traduit une double réalité : le cheval en tant que moyen de déplacement et de transport rapide et en tant qu’animal de référence pour le naam, symbole de puissance et de noblesse.

Le cheval est aux yeux du Moaaga un animal atypique. En galop, il transporte la princesse Yennenga en pleine brousse où sa rencontre avec le chasseur Riyaré (Rialé) donne naissance à l’ancêtre commun revendiqué par les conquérants nakombsé. En reconnaissance de ce service rendu par l’étalon, l’enfant prend le nom de Wédraogo qui signifie « cheval mâle » ou étalon. A propos de l’étalon de l’amazone Yennenga, Maurice DELAFOSSE note qu’au début du XIè siècle probablement, le chef dagomba de Gambaga nommé Nédéga considéra sa fille Yennenga comme un homme afin de conduire l’armée du royaume. Les récentes études comme celles de Michel IZARD, de Joseph KI-ZERBO et de Jean-Baptiste KIETHEGA situent cette période dans la deuxième moitié du XVè siècle. 

En reconnaisance de cette chevauchée légendaire qui donna naissance aux royaumes moosé, le Burkina Faso choisit comme nom de ses équipes sportives « Les Etalons du Burkina Faso » et à travers la plus grande distinction du cinéma africain : « L’Etalon de Yennenga du FESPACO ». 

Longtemps restée dans le célibat, Yennenga disparut avec son cheval qui s’emballa et l’emporta loin de ses troupes et termina sa course dans les environs de Bitou, devant une hutte de chasseur habité par un certain Rialé, fils d’un chef malinké, malheureux candidat à la succession. Attiré par le galop et les hennissements du cheval de la princesse, il sortit de sa hutte et maintint l’animal, aida Yennenga à descendre et lui accorda une hospitalité chaleureuse.

L’escale de la princesse se transforma en un long séjour. Elle se donna au chasseur et ils eurent un fils. En souvenir de l’aventure hippique à laquelle elle était redevable de sa maternité, Yennenga appela son enfant Wédraogo, « cheval mâle » en dagomba et en mooré. Devenu grand, Wédraogo, à la tête de son armée, fonda le royaume de Tengkudgo (Tenkodogo) et reçut l’hommage de partisans dagomba et des populations autochtones. Ses fils furent à l’origine des Etats moosé.

Jean-Baptiste KIETHEGA résume cette chevauchée de la princesse comme suit : « Les Moosé évoquent toujours avec fierté la légende de leur ancêtre Yennenga, fille du roi de Gambaga (Nord Ghana), amazone émérite, dont la fugue sur un étalon et la rencontre avec un chasseur du nom de Riale donne naissance au premier roi moaga : Ouedraogo(l’étalon) qui régna à Tenkodogo, capitale du premier royaume moaga ».

Le nom Wédraogo finit par s’imposer comme le patronyme de la majorité des familles régnantes dans le riungu de Busma et principalement du Rima et de ses kombèèmba. Cela constitue une singularité de Busma, car contrairement à ce riungu, la famille régnante de Wogdogo répond actuellement au nom de CONGO et celle de Tengkudgo au nom de SORGHO.

Le pouvoir est inséparable du cheval. Cet animal bénéficie d’un statut supérieur quasi-humain. Le cheval apparaît comme un instrument de production et de conservation du naam. L’importance du nombre de têtes de chevaux du riungu est l’expression de la puissance du souverain. Le cheval est un atout politique important. Utilisé pour transmettre des messages, il sert aussi comme monture de guerre. Avoir des chevaux de race, rapides et endurants a été pendant longtemps le souci majeur des gouvernants moosé

Des palefreniers prennent soin des chevaux des nanambsé en les nourrissant avec du fourrage, du sel à lécher et du barbotage au son de mil. Ils sont graissés au beurre de karité. Le Rima de Busma dispose de domestiques chargés d’entretenir les chevaux désignés par le terme de wédkiimba en mooré. Ces palefreniers habitent les alentours de la cour royale et sont recrutés par le wédrèing-naaba parmi les nakombsé. Dimfangdo Salifou SAWADOGO ajoute que le cheval ne se nourrit pas seulement d’herbes. Il est au régime du mil comme les hommes. Il est lavé et massé avec la crème de lait (silmikam).

Au-delà de sa rapidité pour les déplacements, le cheval possède la capacité d’entendre ou de sentir une information ou un événement à une distance de 50 kilomètres à la ronde et de la transmettre à son propriétaire par le jeu de la tête. Il soulève la tête, remue les oreilles et refuse de prendre toute nourriture. Cela signifie, selon l’interprétation des Moosé de Busma, qu’un grand événement est en train de se produire du côté où le cheval soulève la tête. Il n’est pas surprenant que le cheval soit l’animal noble par excellence et représente l’un des signes extérieurs du naam

De nos jours, il faut noter que la modernité à relayer le cheval au second rang. Sa fonction s’est réduite en animal de prestige car la voiture a pris sa place pour le déplacement et des engins de guerre existent pour les combats. Le nombre de têtes de chevaux du Rima s’est considérablement réduit et la fonction du wédrèing-naaba devient de plus en plus symbolique. Cependant, pour des rites bien conservés, la montée du cheval par le Rima demeure toujours indispensable. Il y a également des courses de chevaux qui s’organisent lors de festivités traditionnelles ou modernes. 

 

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Busm Kéoog-naaba Koobo (Historien) 

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