Devant le Tribunal : « il a émis des appels dans la zone de Saaba au moment des faits », dixit le procureur

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Devant le Tribunal

N. Kader a comparu devant le Tribunal de grande instance Ouaga 1 le vendredi 28 février 2025 pour répondre de trois chefs d’accusation, à savoir tentative d’actes de grand banditisme, escroquerie aggravée et actes de grand banditisme. Il lui est reproché d’avoir tenté de braquer une boutique Orange Money aux 1 200 logements, d’avoir braqué une autre à Saaba, et d’avoir extorqué la somme d’un million 865 000 FCFA au préjudice de S. Saidou et G. Olivier. À la barre, l’accusé a catégoriquement nié les faits.

 

Le braquage raté aux 1 200 logements

Le 13 novembre 2024, aux environs de 17 heures, N. Kader, en compagnie de S. Victor, a tenté de faire un braquage dans une boutique Orange Money en stimulant un retrait d’argent à l’aide d’un pistolet automatique. Grâce à l’intelligence de la gérante, le coup a échoué, et N. Kader a été appréhendé par le propriétaire de la boutique et le voisinage, qui avaient été alertés par les cris de la gérante. Il a été passé à tabac, et a eu la vie sauve grâce à l’intervention des forces de sécurité.

 

Déclarations de la gérante 

La gérante, lors de sa déposition à la barre, a indiqué que l’accusé était d’abord venu demander un retrait de 3 000 FCFA, mais elle n’avait que 2 500 FCFA. C’est ainsi que le prévenu est sorti pour mettre sa moto (scooter Airblade) en position de départ et est revenu en annonçant qu’il venait de recevoir un dépôt et qu’il voulait faire un retrait de 500 000 FCFA. Bien qu’elle n’avait pas cette somme, la gérante a accepté, espérant joindre son patron pour qu’il lui apporte l’argent. Elle demande alors la carte d'identité nationale (CNIB) de l’accusé tout en cherchant son stylo. Dès qu’elle s’est redressée pour prendre la CNIB, elle se retrouve en face d’un pistolet pointé sur elle. Le prévenu lui ordonne de lui remettre le contenu du coffre. Elle fait savoir qu’elle n’avait pas l’argent, mais que son patron gardait la recette dans le bureau d’à côté et lui suggère d’y aller pour vérifier, la clé étant sur la porte. Dès que l’accusé se tourne, la gérante profite de l’occasion pour s’échapper par la porte arrière de la boutique et lance des cris pour alerter le voisinage, qui réussit à appréhender N. Kader.

 

La défense de N. Kader 

Interrogé sur les déclarations de la gérante, le prévenu rejette tout en bloc et nie être mêlé au braquage. Il explique qu’il partait à Mogtédo et a pris en auto-stop un certain S. Omar, qui partait à Bendogo. Selon l’accusé, ce dernier a demandé qu’il marque un arrêt car il voulait faire un retrait dans une boutique Orange Money. Il affirme qu’il s’est arrêté devant une boutique et que son passager est descendu. C’est pendant qu’il attendait que la foule s’est ruée sur lui en criant "voleur" et a commencé à le frapper, et que son arme est tombée. N. Kader persiste à dire qu’il n’est pas le braqueur. "J’étais assis sur ma moto et ils sont venus commencer à me frapper. Moi aussi je fais des transferts, et je ne peux pas faire ce genre de choses", s’est-il défendu.

 

Les victimes d’escroquerie reconnaissent l’accusé

Après l’épisode du braquage, l’accusé est embarqué par le commissariat central de police de Ouagadougou. La scène de sa bastonnade a fait le tour des réseaux sociaux et est tombée sous les yeux de S. Saidou et G. Olivier, tous deux victimes d’escroquerie, qui ont reconnu en N. Kader leur arnaqueur. Ils se sont rendus au commissariat central de police et ont porté plainte.

 

Escroqueries et faux dédouanement 

À la barre, S. Saidou a expliqué que c’était courant août 2024 qu’il avait fait la connaissance de N. Kader à Sabou. Ce dernier s’était présenté comme douanier et lui avait fait savoir qu’il avait du sucre saisi en vente dans leur brigade. S. Saidou a alors marqué son intérêt et a dit vouloir acheter une tonne. La victime raconte que l’accusé l’a trimballé au gouvernorat du Centre-Ouest à Koudougou aux alentours de 17 heures et a fait croire à celui-ci qu’il s’agissait du service des douanes de Koudougou. Il lui a pris la somme de 570 000 FCFA, ainsi que sa carte nationale d’identité (CNIB), pour rentrer, disait-il, faire le dédouanement, puis est entré dans le gouvernorat. Quelques temps après, il est ressorti et a expliqué à S. Saidou que la personne chargée de faire le dédouanement était sortie et qu’il fallait patienter. Prétextant une course en ville, N. Kader enfourche sa moto et disparaît. S. Saidou est resté sur place jusqu’à 19 heures passées avant de se rendre compte qu’il avait été berné.

 

Mode opératoire similaire avec G. Olivier

Même mode opératoire chez G. Olivier, qui pour sa part a raconté que c’était son voisin qui l’a mis en contact avec N. Kader et lui a présenté celui-ci comme étant un douanier affecté à Sabou et qu’il avait du sucre qu’il avait saisi en vente. Il est alors entré en contact avec N. Kader, qui lui a indiqué que le camion était en route pour la douane de Koudougou et a proposé qu’ils se rendent à Koudougou pour faire le dédouanement. G. Olivier rapporte qu’aux environs de 19 heures, l’accusé l’a conduit devant un service (le gouvernorat), qu’il a présenté comme étant la douane, et a pris un million 295 000 FCFA ainsi que sa CNIB pour rentrer faire le dédouanement. "Il est ressorti peu de temps après, me dire de patienter devant le service et qu’il allait acheter une bâche pour couvrir le sucre. J’ai attendu jusqu’à 22 heures, mais rien", relate G. Olivier avec amertume.

 

Le démenti de l’accusé et la contestation des faits

Sur un ton placide, le prévenu dit ne pas connaître les deux victimes. Il précise que la dernière fois qu’il s’est rendu à Koudougou, c’était en 2020.

 

Les réclamations des victimes et la demande de condamnation

Qu’à cela ne tienne, S. Saidou et G. Olivier, s’étant constitués en partie civile, ont réclamé respectivement 570 000 FCFA et un million 295 000 FCFA au titre du préjudice causé.

 

La plaidoirie du procureur 

Pour le procureur, le prévenu persiste dans le mensonge en niant l’évidence, car il a été pris en flagrant délit de tentative de braquage et les faits sont caractérisés. En ce qui concerne les faits d’escroquerie, le procureur a relevé que ce sont les victimes qui ont elles-mêmes reconnu l’accusé et que celui-ci s’est prévalu d’une fausse qualité et a usé de manœuvres frauduleuses. Du reste, sur réquisition, il est prouvé que le prévenu a émis des appels dans la zone durant la période des faits. Pour ce qui est des faits d’acte de grand banditisme, l’accusé a été identifié par une tierce personne qui a été victime de braquage dans sa boutique de vente de téléphones portables. Aussi, la réquisition a permis de savoir qu’il a émis des appels dans la zone de Saaba au moment des faits. Le procureur a estimé que les faits reprochés à l’accusé sont d’une extrême gravité et qu’il est important que le Tribunal donne un signal fort en le déclarant coupable. En répression, le procureur a demandé de condamner N. Kader à 11 ans de prison, dont 6 ans ferme, une période de sûreté de 5 ans et un million de FCFA d’amende ferme.

 

La défense de l’accusé 

La défense du prévenu a indiqué que son client ne se reproche rien, car s’il avait fait le braquage, il aurait pu tirer en l’air et prendre la fuite, mais il n’a rien fait de tel. Selon l’avocat de la défense, son client avait sur lui son passeport, son permis de port d’arme, sa carte de commerçant et des numéraires : "Quelqu’un qui a tous ces documents, peut-il aller faire un braquage ?", a questionné l’avocat de la défense. Concernant les déclarations des victimes, il a précisé qu’elles ne peuvent en aucun cas constituer des preuves et a émis des doutes sur les faits d’escroquerie, soulignant qu’il n’y avait pas d’indices et que des confusions pouvaient être possibles. "Rien ne prouve que l’accusé ait pris leur argent", a lancé le conseil de la défense avant de plaider la relaxe de son client au bénéfice du doute.

 

Le Tribunal a mis le verdict en délibéré pour le 7 mars 2025.


Ahmadou SERIGNE
Zoodomail.com

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